Un bourgeois tout petit petit (Mario Monicelli, 1977)
Génialement porté par l’immense Alberto Sordi, le film de Monicelli doit également à son traitement une grande partie de sa réussite. Pendant une heure, il s’inscrit dans la plus pure tradition de la comédie italienne: satire féroce de la bureaucratie, portrait au vitriol d’une petite classe moyenne aussi attachante que médiocre, galerie de personnages grotesques. Une heure, c’est le temps qu’il faut au spectateur pour voir « il signore Vivaldi » (Sordi) se démener auprès de sa hiérarchie pour trouver un poste à son fils au sein « du ministère » où il travaille depuis plus de 30 ans. Au mi-temps du film, la perte tragique au cours d’un hold-up de ce fils chéri va bouleverser son existence et faire basculer la narration dans un degré de noirceur bien supérieur. C’est cette deuxième heure qui fait passer Un borghese piccolo piccolo de très belle réussite à film magistral. Réflexion sombre, subtile et pointue autour du deuil et de la vengeance, il nous offre au passage deux ou trois séquences inoubliables (et particulièrement celle se déroulant dans un réfectoire où s’entassent les cercueils attendant d’être mis en terre: pour moi, c’est du jamais vu). Un drame sensible et humain, supérieurement intelligent, que les amateurs de cinéma italien ne manqueront pas de placer très haut dans leur panthéon personnel.